14-17 juin 2021 Montpellier (France)
Le Ball de Benás (Aragon, Espagne): un territoire qui se perçoit comme communauté linguistique et qui patrimonialise son patués
Henri Boyer  1@  
1 : Laboratoire de linguistique diachronique, de sociolinguistique et de didactique des langues
Université Paul-Valéry - Montpellier 3 : EA739

Cette contribution traitera de patrimonialisation (et donc d'identité), au travers de mises en discours/scène d'un (petit) territoire singulier: la Vallée de Benasque, et de sa langue, tout aussi singulière: le patués, vernaculaire né sûrement du contact entre le catalan, l'aragonais et l'occitan et en situation de contact diglossique avec le castillan, langue officielle de l'Etat espagnol. Le patués, parlé, (encore) transmis et célébré ne jouit d'aucune co-officialité, mais fait l'objet d'un soutien de la population, des autorités municipales et régionales . Par ailleurs, et ce n'est pas la moindre des originalités, le désignant « patués » n'a absolument pas sur ce territoire le sens péjoratif qu'il a encore dans l'aire francophone française: il s'agit d'un glossonyme en usage non-stigmatisant.

Le patués ou benasqués, parlé par moins de 2000 usagers, fait l'objet d'interventions militantes originales. Il s'agit dans ce cas d'une patrimonialisation de par en bas et clairement dynamique, productive, qui n'a rien à voir avec la patrimonialisation atone, de l'ordre de la folklorisation Les interventions glottopolitiques de promotion du patués n'ont pas manqué au début des années quatre-vingts sous l'impulsion, en particulier, d'une groupe de femmes de cette petite vallée pyrénéenne: les Donisas (de dona=femme) bien décidées à "mover el patués" [(faire) bouger le patois] objectif atteint rapidement en particulier grâce à une présentation en patués (et en castillan) des Femmes et les Hommes qui vivent et travaillent à Benasque et sur le territoire de la Vallée, au travers de recueils de portraits, de témoignages... restituant du même coup à une langue minor(is)ée sa dignité scripturale. D'autres acteurs du territoire et de la promotion de sa langue ont joué également leur rôle dans la patrimonialisation territoriale et ethnosociolinguistique (la municipalité, la revue Guayente...), contribuant également au maintien d'une authentique communauté  linguistique. Je rendrai compte d'une enquête ethnosociolinguistique de terrain réalisée lors de plusieurs séquences à Benasque en 2018 et 2019, au cours desquelles ont été enregistrés une dizaine d' entretiens semi-directifs auprès d'acteurs sociaux et d'habitants de la vallée.


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