Pour bien des écrivains, l'identité est déterminée par l'ethnie, la race, la religion, la langue ou l'aire géographique qui les a vu naître. Pour les Amazighes, l'identité est surtout fondée par l'appartenance à une terre, à un espace. Et Mohamed Khaï-Eddine ne déroge pas à cette règle car, pour cet écrivain, l'amazighité est d'abord un territoire que viennent auréoler une langue et une culture ancestrales. Ce romancier désigne indistinctement dans son écriture le socle spatial qui porte cette essence identitaire et qu'il délimite en un triangle dont les angles sont constitués par les villes Tiznit, Tafraout et Taroudant. Il est question de la région de Sous, dans l'Anti-Atlas. Une région de désolation, inhospitalière, meurtrie aussi bien par les éléments naturels que par l'homme.
Khaïr-Eddine puise dans le patrimoine culturel et littéraire local pour donner corps à cette amazighité diffuse dans toute son œuvre romanesque. Le recours au conte, au mythe, à la légende ...permet de transcrire et de traduire cette amazighité que le lecteur ressent à fleur de texte.
Mais pourquoi cette fixation sur cette amazighité qui investit toute l'écriture romanesque de Khaïr-Eddine ? Sera-t-elle une tentative d'historisation d'une origine qui se perd dans la nuit des temps ? Est-elle une nostalgie pour une composante fondatrice de l'identité qui, progressivement, s'effrite et sévit sous les coups du boutoir du modernisme ? Ou s'agit-il d'une quête de soi, une quête ontologique de la part du romancier dans la perspective de réédifier une identité lézardée par tant d'années d'errance ?