14-17 jun. 2021 Montpellier (Francia)
La Légion étrangère, une spécificité française au croisement entre langue(s) et territoire(s)
Françoise Favart  1@  
1 : Università di Trieste e università di trento

Voulue par Louis-Philippe en 1831, la Légion étrangère constitue une exception française qui à l'origine n'avait pas le droit de stationner en France. Ce n'est qu'à partir de 1962 (accords d'Évian), que ce corps d'élite de l'Armée de terre, incorporant des engagés provenant de plus de 140 nationalités (Maniakis, 2014) s'implante en territoire français. Actuellement constituée d'un état-major situé à Aubagne et de onze régiments dont le 4ème auquel nous nous intéresserons ici pour sa « vocation spécifique ». Il s'agit en effet du régiment-école de Castelnaudary où les nouveaux engagés, provenant d'horizons linguistiques les plus variés devront, en quelques mois, apprendre la langue française ou pour le moins une forme de langue destinée à répondre aux besoins spécifiques du « territoire » que constitue la Légion. On peut de fait parler de territorialisation car c'est par l'inscription quotidienne des pratiques singulières sur un support spatial donné [...], que l'acteur se crée une territorialité propre (Di Méo et Buléon, 2005). Pour le futur légionnaire un des axes majeurs est l'apprentissage du français. Au plan linguistique, les groupes d'engagés sont disparates et hétérogènes. On y relève toutefois les prédominances de l'Europe centrale des Balkans et de la France (Texier, 2001 : 9). Il n'en reste pas moins que le taux de locuteurs de langue française est insuffisant pour garantir l'apprentissage du français aux “non-francophones”. Si certaines zones d'ombres persistent quant à la méthodologie mise en œuvre pour enseigner le français, il est clair que les pratiques didactiques reposent essentiellement sur des binômes, souvent même des trinômes où un francophone a pour mission d'encadrer un ou deux locuteurs ne connaissant pas la langue française. On voit bien ici l'importance de la partition francophone vs non-francophone. De fait, à leur arrivée, les légionnaires sont répartis en deux groupes en vue de spécifier le rôle de chacun au sein du binôme/trinôme. Le francophone est alors mis en situation d'acteur de l'enseignement sans nécessairement disposer des capacités et des qualités requises par les pratiques didactiques. Par ailleurs, la définition de francophone est parfois floue au sein de la Légion.

Nous savons en outre que l'un des outils didactiques de référence des formateurs est le carnet “Chants de la Légion étrangère”, un instrument qui au plan discursif ne se présente pas comme un genre destiné à l'apprentissage linguistique.

En nous appuyant sur des enregistrements vidéo d'extraits de cours[1] ainsi que sur les supports didactiques papier disponibles, nous essaierons de décrire et d'analyser ces pratiques d'apprentissage pour nous demander comment, malgré la singularité de l'approche, celle-ci semble répondre de manière satisfaisante aux besoins du territoire.

 

Bibliographie

Di Méo, G. et Buléon P. (dir.), 2005, L'espace social. Lecture géographique des sociétés, Paris, A. Colin.

 

Maniakis, H., 2014, Construction du savoir langagier en français à la Légion étrangère : la double hybridation linguistique dans l'interlangue des légionnaires russes et polonais.

 

Texier, M., 2011, Identités et langues à la Légion étrangère, Res Militaris, vol. 1, n°3.

 

 

 


[1] Si les conditions sanitaires nous le permettent, nous nous appuierons également sur des entretiens de terrain.


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