Cette proposition de communication vise à rendre compte, au travers d'une démarche informée par la sociologie de l'action publique, de l'intervention des anciennes régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées (puis de la région Occitanie) en domaine culturel et linguistique. Les actions des collectivités territoriales en faveur des langues et des cultures régionales prennent véritablement forme dans les années 1980 dans le sillage des lois de décentralisation, au niveau régional tout particulièrement (Pasquier, 2012). C'est ainsi au cours de l'année 1985 en ex- Languedoc-Roussillon et en 1989 en ex- Midi-Pyrénées que sont engagés des programmes publics structurés ayant pour objectif la promotion et la valorisation de la langue et la culture occitanes. Quoique souvent d'envergure modeste, ces « politiques linguistiques institutionnelles » (Boyer, 2010) situées entre un régime politico-juridique formel relativement peu favorable et des mobilisations culturelles et politiques de terrain au long cours orientent l'analyse dans trois directions.
Nous nous interrogerons tout d'abord sur les facteurs qui ont présidé à l'institutionnalisation de ces politiques publiques culturelles et linguistiques, lancées après deux décennies vécues comme les « vingt glorieuses de l'occitanisme » (Lafont, 1991 : 116). Il faudra dans ce cadre reconstituer la genèse et l'évolution de ces politiques régionales de la langue (des années 1980 à nos jours) au double regard de la situation sociolinguistique de l'occitan et de l'histoire d'une revendication occitane organisée depuis le XIXe siècle. Il conviendra ensuite de se pencher plus spécifiquement sur les dynamiques institutionnelles et politiques de cette action publique : si la promotion des langues minoritaires constitue explicitement avec l'article 104 de la loi NOTRe du 7 août 2015 une compétence partagée entre toutes les collectivités territoriales, c'est au niveau régional que l'intervention publique a été la plus ancienne et la plus étendue. Il faudra examiner dans quelle mesure ce mouvement qui oscille entre patrimonialisation et revitalisation linguistiques s'enracine dans un triple contexte : celui de la construction identitaire des espaces régionaux, celui de la marchandisation des langues-cultures dans le gouvernement au local (Heller, 2003), et celui des évolutions juridiques et politiques en matière de droits culturels et linguistiques, au niveau européen en particulier. Il sera enfin question d'explorer les récentes recompositions de ce secteur d'action publique, dans le contexte d'une région en fusion qui s'est emparée en 2016 à la suite d'une consultation populaire rassemblant 204.000 participants d'un nom longtemps véhiculé par le militantisme régionaliste, et qui jadis faisait polémique.