Dans notre étude, nous proposons de nous focaliser sur les configurations spatiales qui dévoilent la condition de précarité dans laquelle se retrouvent certaines catégories de personnes qui, « retranchées d'une communauté » (Guilloux 1942 :100), ne font plus partie de la Gemeinschaft sous le nazisme. Dans la continuité du raisonnement lefebvrien (Lefebvre 2000), nous allons examiner la conception spatiale de l'exclusion qui s'exerce au niveau relationnel afin de déterminer la manière dont les nouvelles mesures et la législation (lois raciales, persécution, spoliations) peuvent s'exercer à l'intérieur du corps social. Les protagonistes, souvent dépourvus de patronyme et de prénom, vivent dans des espaces séparés du reste de la communauté, dans les étables ou les écuries ; parfois anonymes, ils se présentent dans des espaces communs, avec leur valises, exilés des territoires devenus interdits à cette catégorie d'hommes qualifiés de Juifs. C'est sur cette condition de précarité et d'exil meurtrier que nous allons nous focaliser chez des écrivains français (Cassou, Guilloux) et Luxembourgeois (Faber, Palgen) à travers les textes composés dans les années 1930-1940. Les territoires sont aussi directement liés à la langue. Les travaux de Victor Klemperer témoignent de ce lien indissociable à travers les manipulations du nazisme sur la langue allemande et par là même, sur la mentalité et les actes (Klemperer 1996). C'est cette dimension de territorialité, en lien directe avec la langue, que nous allons interroger dans les textes de fiction qui dénoncent, d'une manière implicite ou explicite, à travers les mots et les propos antisémites, à travers la mise à l'écart et la législation, l'annihilation de l'être humain.
- Poster